Menés par le frère Mathéus.
(figurines Rackham et Citadelle)
Des articles sur ce que je fais de mes figurines et ce qu'elles font de moi.
Le domaine était tranquille. Une légère brume l’envahissait lentement, comme précautionneusement. L’air était lourd, chargé. La lune dominait.
*
Behaine se posta à la fenêtre. D’ici, il pouvait sentir l’océan, le blé, l’odeur particulière des vents frais des hauteurs, tout le continent. Son premier continent pacifié. C’aurait du être le dernier, songea-t-il en y repensant encore une fois. Le nain sondait l’obscurité, la brume arrivait de l’ouest, elle attaquait littéralement les murs du château. Cela faisait bien longtemps qu’un brouillard ne s’était pas installé sur cette partie de Zasodhil. C’était la première fois, en fait. C’en était presque inquiétant.
*
L’humain leva le bras, la voie était libre. Six autres ombres se faufilèrent jusqu’au mur. Ils s’étalèrent jusqu’à s’aligner tous contre la paroi, et commencèrent l’ascension. Les simples saillants que formaient les pierres suffisaient pour leurs doigts exercés, et telles de grotesques araignées, ils grimpèrent encore et encore, sans interruption, jusqu’à atteindre les créneaux. Là ils redevinrent des ombres.
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Behaine vida sa chope d’un air songeur. Cette nuit s’annonçait longue, il le savait. Sur Daifen, peu de choses arrivaient par hasard. Le destin, il n’y avait jamais vraiment cru. Mais les signes, il savait les écouter, ou du moins les remarquer.
Il se leva, passa une énième chemise propre et descendit lentement les marches menant à l’étage inférieur. Le silence régnait. Il descendit jusqu’au sous-sol et la salle de garde. Deux nains en poste le saluèrent, étonnés de le voir levé à cette heure. Il leur adressa un sourire sans chaleur et entra. A l’intérieur, la majorité des forgerons dormaient. Il resta quelques secondes à les observer. Il pensa à tous les réveiller, hurler, leur conseiller de rentrer chez eux, de cesser ce jeu stupide auquel jouaient les seigneurs de Daifen, tous plus avides les uns que les autres. Et il était bien placé pour le savoir. Behaine le Marchand, se dit-il, tu es peu de chose.
Il traversa la pièce jusqu’au présentoir et se choisit une hache de simple facture. Rien à voir avec Kal, la hache légendaire de son cousin et ami, rien à voir avec son habituel arme, parée de runes et de diamants. Un sobre manche de bois, une lame affutée. Ce serait tout pout cette nuit.
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La sentinelle se pencha par-dessus le mur. Tout était calme, le mur accusait réception de cette enivrante brume. On ne voyait pas le sol, en contrebas. La sentinelle releva la tête, et se la fit couper. Elle tomba, sombrant dans le brouillard. La première ombre des sept se hissa sur le mur et avança à pas feutrés, les autres sur les talons. Les nains furent vite éliminés, proprement et silencieusement.
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Le Duc s’avança jusqu’au pont-levis. La brume, qui couvrait le domaine, l’empêchait de voir le haut des murs. Mais il savait. L’absence de cris dans la nuit indiquait qu’ils avaient réussi. Il allait donc réussir. Il longea la route et s’arrêta à un mètre des douves. Sur son épaule reposait son marteau. Il portait une armure noircie, aux bords imperceptiblement dorés. Sa tête était à l’air libre, une brindille sauvage pendant à ses lèvres.
*
Les gardes voulurent lui parler, le questionner, l’accompagner, mais Behaine garda le silence. Il les laissa à leur poste d’un geste autoritaire et leur accorda un dernier signe de tête. Il sortit du fort et progressa jusqu’au mur sud. La haute porte de bois ferré se dressait maintenant face à lui. Il chercha dans la brume le poste de garde de la porte.
« Pas la peine. » Lança une voix, quelque par devant lui.
« Qui êtes vous ? »
« Ceux qui ouvrent la porte vers le destin. »
En avançant, le nain distingua des corps inertes sur le sol. Il se retourna, observa les ténèbres tout autour de lui. Son interlocuteur restait introuvable.
« Il est dehors n’est-ce pas ? »
« Il vous attend. »
« Ouvrez la porte. »
La porte s’ouvrit.
*
Le Duc vit la porte s’ouvrir, entraînant avec elle des remous dans le brouillard. Le pont levis s’écrasa juste devant lui. Behaine était là. Il n’était pas armuré, portait une petite hache traditionnelle. Le Duc le rejoignit. Ils s’arrêtèrent à deux mètres l’un de l’autre. Le silence dura quelques minutes.
« Ainsi je suis le prochain sur votre infinie liste ? »
« Exact. Un marchand de moins. Un allié des Extrémistes de moins. Un vivant de moins. Toi et toute ton armée, ton domaine, tes gens, ton expansion. Tu es un virus, tu sais ? Tu fais partie de
« Epargnez-moi vos sermons. Faites simplement ce pourquoi vous êtes venu. »
« A tes ordres. »
Le Duc leva son marteau à l’aide de ses deux mains, Behaine fléchit les jambes. Le marteau décrivit une rapide courbe avant d’écraser le bois du pont là ou le marchand s’était tenu une seconde plus tôt. Sa hache fendit l’air mais ne trouva pas de faille dans l’armure complète. Un coup de manche fusa, puis un contre, une feinte et une ruée de coups… Le combat s’intensifia, les deux camps s’essoufflèrent.
« Aujourd’hui, un autre surplus de ce monde m’a qualifié de Bras de Gaïa. Je trouve l’expression très jolie. Tu vas mourir du Bras de
« Vas te faire foutre. »
*
Behaine redoutait cependant que le Duc n’ait raison. Il ne s’était pas entraîné depuis des lunes et des lunes… Et n’était pas parti en conquête depuis au moins autant de temps. La guerre n’était plus pour lui qu’un brouhaha lointain. Mais il avait oublié qu’on n’y échappait pas sur Daifen. Cet enfoiré de fataliste le lui rappelait aujourd’hui.
Et s’il mourrait cette nuit ? C’est ainsi, tenta-t-il de se convaincre. Adieu tous.
*
Behaine enchaîna plusieurs coups rageurs. L’armure de son adversaire commençait à céder par endroits. Il se jeta à l’attaque et profita de la mauvaise posture du marteau pour contourner son axe et asséner plusieurs autres frappes dans le dos du Duc. Mais l’armure…
Et il n’y avait pas que cela. L’armure protégeait le nain, c’était une certitude, mais sans elle, Behaine n’était pas sûr de pouvoir gagner non plus. Le Duc accusait les coups comme s’il ne les sentait pas, et semblait s’en amuser. Au point de ralentir, de baisser sa garde, de laisser volontairement son ennemi le taillader de violents coups. Behaine savait que le Duc était capable de mieux. Il redoutait simplement le moment où cela arriverait.
*
Le Duc encaissa une nouvelle volée de coups. Cela faisait assez longtemps qu’il jouait, estima-t-il. Il para le coup suivant et se recula de deux pas.
« Un dernier mot ? »
« Fais ça proprement. »
Le Duc s’élança, son corps entier projeté en avant, en l’air, comme ralentit par la brume devenu plus intense. Le marteau se rapprocha rapidement, jusqu’à toucher la joue. L’impact ne fit presque aucun bruit.
Voici une intro que j'ai écrite hier soir pour un début de campagne 40k. Si ça peut en inspirer d'autres que moi, tant mieux =)
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Le satellite d’observation MinosIV décrivait son habituelle courbe décroissante, celle du cycle de fin de semaine. En contrebas, la surface de Kaltar se faisait peu à peu envahir par la lumière du premier soleil du système, les rayons se heurtant aux Monts du Centre, comme ralentis par une imposante et déterminée muraille naturelle. De l’autre côté, à l’ouest, la nuit durerait encore quelques heures.
L’agent Gremsh jeta un coup d’œil par-dessus sa tablette de données. Sur le tableau, devant lui, des centaines de voyants clignotaient selon un rythme anarchique que seuls les adeptes de la Machine ne pouvaient assimiler. Toute cette agitation lumineuse ne lui indiqua rien de particulièrement frappant, aussi revint-il à ses notes en desserrant sa ceinture.
De l’arrière de son crâne émergeait un long câble qui allait se perdre dans les nombreux branchements de la machine. Il disposait de deux bras supplémentaires, accolés dans son dos au niveau des omoplates, mais il les laissait la plupart du temps en veille. Il fêtait aujourd’hui ses deux cent vingt ans, comme l’indiquait une fonction secondaire de son calendrier interne. Cela n’impliquait rien. Gremsh n’était plus vraiment un humain. C’était avant tout et pour tout un serviteur du Culte de la Machine et de l’Empereur-Dieu.
Il soupira et lâcha la tablette qui alla dériver vers le haut de la capsule en tournant lentement sur elle-même. D’un ordre mental distrait, il fit pivoter le satellite et ouvra deux des six volets blindés. Les vitro-plasmas lui laissèrent la vue libre sur l’espace. Les astres, il était parmi eux. Mais quelque chose capta son attention : un épais nuage cosmique, quelque chose qu’aucun de ses détecteurs ni aucun capteurs extérieurs n’avait relevé. C’était quelque chose de stupéfiant, de magnifique et d’effrayant à la fois.
A cette distance, aucun homme ni aucune machine n’aurait pu identifier la chose, mais Gremsh n’aurait eu aucun mal à l’assimiler à une sorte de toile d’araignée. Comme un filet mobile, un filet se déplaçant vite.
S’étant autorisé quelques secondes de contemplation, l’adepte se calla à nouveau au fond de son antique fauteuil et resserra ses liens. Ses deux bras additionnels s’activèrent d’un battement de cil, tandis que ses deux autres, les normaux, bien que soudés à d’impressionnants gants de fer fins, entamaient leur danse autour des innombrables commandes de bord.
« Occulo-serviteur Gremsh, code 04762 pour Kaltar, deuxième phase du cycle décroissant. Lancement d’une analyse à longue portée. Ouverture totale des volets. Philtres prêts. Démarrage des réacteurs tracteurs. Activation des sondes une et deux. S moins trois avant lancement, deux, un, lancement. Par le Trône d’or, quelle vitesse… Demande de communication avec Kaltar. »
Occupé par un certain nombre de manipulations, Gremsh mit plusieurs minutes à envoyer un signal stable et à pouvoir en recevoir un en retour. Les deux sondes s’écartaient désormais plus loin que le scanner ne pouvait les suivre.
« Ici centre beta, à MinosIV, répondez.
-Ici MinosIV, reçu. Je vous envoie les dernières analyses en urgence, code ouvert.
-Vous n’avez pas l’autori…
-Ouvrez le réseau, vermines de la surface, je n’ai que très peu de temps ! Ils sont presque sur moi !
-Qui ça ?
-Le réseau, par Terra ! Centre Beta ? Répondez, centre Beta ! »
Les voyants semblèrent s’agiter plus que de coutume. En voyant cela, Gremsh arrêta la transmission, qui de toute façon, et de manière toute à fait inexplicable ne marchait plus. La gigantesque toile d’araignée était en faite plus grande encore, s’étendait sur une surface folle, et fonçait plus vite que tout ce qu’avait pu voir le serviteur du Dieu-Machine dans sa longue vie, droit sur Kaltar.
« Inversion des réacteurs, fermeture des volets. Rapport des sondes - sondes perdues. Bon sang… Départ d’urgence pour la surface ! Puissance maximale – réacteurs en surchauffe – coque endommagée aux points quatre, huit et neuf ! Guide-moi… Guide mo… »
Le satellite fut brusquement balayé par une immense masse noire, reliée à d’autres par une sorte de filament laiteux, presque translucide. Gremsh eut le temps de prier quatre secondes de plus avant d’être soufflé par le passage d’une nouvelle forme énorme mais indistincte.